dimanche, février 05, 2006

Guerre de civilisations

Le 8 juillet, à la suite des attentas de Londres, j’écrivais que je craignais que tous ces actes ne nous amènent vers des guerres de religion. Les développements de l’affaire des caricatures de Mahomet me renforcent dans ce sentiment. Mais le terme « guerre de religion » est probablement mal choisi. Il ne s’agit pas tant d’une religion, qui n’est ni meilleure ni plus mauvaises que les autres (je suis athée, il n’y a aucun doute dans mon esprit sur l’inexistence d’un Dieu) mais plutôt d’une civilisation. Les pays du Proche et du Moyen-Orient comme les pays du Maghreb représentent une civilisation, différente de la nôtre, une civilisation basée sur la religion musulmane. Il se trouve que ces deux civilisations se frottent actuellement. Elles se frottent pour plusieurs raisons dont beaucoup doivent m’échapper. Parmi ces raisons, il y a le fait qu’elles reposent sur des fondements différents, sur des religions différentes (judéo-chrétienne d’un côté, musulmane de l’autre), religions qui se sont déjà opposées à de nombreuses reprises dans l’Histoire. Elles sont donc intrinsèquement différentes dans leurs conceptions, que ce soient sur la place des hommes, des femmes ou du spirituel dans la société. Et, bien entendu, chaque civilisation pense être meilleure que celle d’en face (en particulier la civilisation occidentale). Ces deux civilisations pourraient très bien cohabiter si elles ne se rencontraient pas trop. Malheureusement (ou heureusement d’ailleurs), les points et les occasions de contact sont multiples : immigration (la civilisation musulmane est nettement plus pauvre, ce qui provoque des flux migratoires), commerce (l’essentiel de l’approvisionnement en pétrole s’effectue au Moyen-Orient) et … guerre. Guerre parce que les Etats-Unis (leader incontesté et incontestable de la civilisation occidentale) et leurs chefs sont persuadés que leur modèle de civilisation est le bon et qu’ils doivent en faire « profiter » le reste du monde. Mauvaise idée, comme d’habitude.

Cette conduite est aussi amenée par le fait que les Etats-Unis ont constamment besoin d’un ennemi pour fonctionner. Le terrorisme est ce nouvel ennemi et pour le combattre (et sécuriser les approvisionnements en pétrole au passage), rien de mieux que d’amener, de force, la démocratie dans les pays tenant de la civilisation musulmane. Excellente idée encore : toutes les élections récentes dans les pays du Moyen-Orient ont porté des radicaux islamistes au pouvoir ! Les grands pays européens, avec leurs tristes expériences coloniales, savent (presque) désormais qu’on n’apporte pas une civilisation de force à un peuple mais les Etats-Unis (qui n’ont pas de passé colonial, et pour cause …) n’arrivent ou ne veulent pas comprendre cela. Les interventions successives des USA dans l’échiquier géopolitique ces 60 dernières années ont crée des problèmes gigantesques. Il y a une trentaine d’année, les USA (et les européens d’ailleurs) lâchaient le Shah d’Iran (alors que les femmes se promenaient avec des mini-jupes dans les rues de Téhéran !) et permettaient la révolution islamique. En 2006, l’Iran, avec à sa tête des religieux radicaux et un président extrémiste-populiste, s’apprête à acquérir l’arme atomique …

L’opposition des civilisations fait donc déjà rage, avec comme points chauds l’Irak et la Cisjordanie. Les positions se raidissent et il semble que l’on se comprenne de plus en plus mal. L’exemple des caricatures de Mahomet en est un exemple incroyablement parlant. Il suffit d’observer la fureur de certains émeutiers en Syrie ou au Liban et l’hébétude des Danois devant les images de leurs drapeaux et ambassades en flamme.

Je n’ai aucune foutue idée de l’endroit où tout cela va nous mener mais je ne souhaite qu’une chose : ne jamais avoir à choisir un camp et un fusil.