lundi, mars 06, 2006

Et si on se le tentait ?

Je suis de gauche, ce n’est une nouvelle pour personne. Plutôt socialiste, tendance Strauss-Kahn, c'est-à-dire, ce qui se fait de plus au centre à gauche (personne ne confond sa droite et sa gauche, non?).

La politique est un sujet de discussions et, en ce qui me concerne, de réflexion quotidien. La bataille politique actuelle s’articule autour du CPE. Contrat de première embauche donc. Un pseudo-CDI doté d’une monstrueuse période d’essai de deux ans.

Le premier réflexe d’un homme de gauche consiste à rejeter ce genre d’initiatives particulièrement précarisantes. Mais nous devons, je pense, rester ouverts et écouter les arguments des autres tendances politiques, surtout lorsqu’elles sont au pouvoir. Alors, j’entends les arguments qui disent que 25% des jeunes sont au chômage et que rentrer dans le marché du travail par un CPE, c’est encore mieux que de ne pas y rentrer du tout. Certes. Alors, dans un moment de faiblesse, j’ai envie de dire, tentons le ! Pourquoi pas après tout, et si ça marchait ?

Oui mais voilà, on touche ici, le dilemme actuel de la gauche : accepter le monde tel qu’il est et essayer d’atténuer ses défauts et dérives ou bien proposer un autre modèle politique et social. De mon côté, je crois que l’un ne va pas sans l’autre et que nous devons accepter le monde tel qu’il est actuellement (for the time being comme disent nos futurs adversaires dans le tournoi des VI nations) et en même temps, préparer un avenir différent.

J’ai l’impression que ce qui nous manque, aujourd’hui plus qu’hier, c’est une vision de l’avenir, une vision positive (on croirait entendre Raffarin !), c'est-à-dire qu’il nous manque un projet de société et même, allons-y de civilisation, un projet qui nous apporte la certitude que demain sera meilleur qu’aujourd’hui, ce que la gauche appelait (et dont elle ne parle plus, sauf à l’extrême peut-être) le progrès social. Cette certitude que la vie serait meilleure pour nos enfants, meilleure dans le sens du bonheur. Je ne suis pas né pour autre chose que le bonheur, hors notre société ne semble plus tendre vers le bonheur de ses membres mais uniquement vers sa performance financière. Ce n’est pas être d’extrême gauche que d’affirmer cela, c’est être simplement observateur ; ce n’est pas être feignant et refuser de travailler, c’est être réaliste sur la façon dont fonctionne (sur la tête) notre société capitaliste. Entendons-nous bien encore une fois, je ne souhaite pas la fin du système capitaliste, je pense qu’il reste, à ce jour, et jusqu’à une solution meilleure émerge, le meilleur (ou le moins mauvais, c’est selon) système que nous ayons à disposition.

Mais le capitalisme d’aujourd’hui marche sur la tête, il marche sur la tête, je crois, parce que nous avons trop laissé faire les libéraux. Les libéraux, ce sont ces gens qui nous expliquent que la concurrence est bonne en toutes circonstances et que les marchés ne doivent pas être réglementés et s’autoréguleront d’eux mêmes.

Je ne suis absolument pas d’accord avec cela. Mais alors pas d’accord du tout et c'est ce qui fait de moi un homme de gauche. Parce que je pense que le plus important, ce n’est pas le marché, ce sont les hommes et les femmes de cette planète. Je ne peux pas adhérer à cette thèse de la libre et obligatoire concurrence en tout, elle n’est pas toujours la solution ultime, loin de là. Allons donc demander aux habitants de la Californie privés d’électricité parce qu’Enron avait décidé de faire des profits sur leurs dos avant de sombrer. C’est un exemple facile, je le sais mais il est tellement frappant. Plus près de nous, les services téléphoniques (le fameux 12) ont récemment été ouverts à la concurrence. Riche idée : les temps d’attente sont devenus plus longs, les taux de bonne réponse plus faibles et les coûts se sont envolés pour le consommateur.

Non et re-non, la concurrence n’est pas bonne en tout même si elle nous fait avancer chaque jour dans nombre de domaines. Je ne l’oublie pas. Le capitalisme effréné ne nous conduit pas dans la bonne voie, que ce soit pour demain ou pour dans 50 ans. Pour demain parce que ce capitalisme là nous force à mettre des milliers d’hectares de terre en jachère en Europe alors qu’une partie de l’humanité souffre encore de famine ! Il n’est pas bon pour dans 50 ans non plus parce que je ne peux pas faire confiance à des entreprises qui publient des résultats financiers chaque trimestre pour prendre soin de la planète. Ces deux buts là sont antinomiques la plupart du temps. En un mot, le capitalisme a besoin d’être régulé, contrôlé et asservi à la condition humaine et non l’inverse. Cela semble l’évidence même et pourtant, j’ai l’impression que nous l’oublions petit à petit.

Je vous reparlerai plus tard du capitalisme et en particulier pourquoi je considère qu’il marche sur la tête ces temps-ci.

Alors, le CPE, tentons-le, des fois que, en attendant, j’espère que nous ayons de véritables idées pour rendre notre vie et celle de nos enfants et des enfants de nos enfants meilleures.

Nous sommes encore le 6 mars 2006 pour quelques minutes. Je pense un peu à Caroline, ma petite chieuse préférée pour le moment, je compte sur elle lundi. Bonne nuit.